23 août 2010

Bien à toi

Privé de mon animal, je suis de retour à la case D, à savoir : trouver un sidekick.

Le peu de succès obtenu avec les entrevues me contraint, contrit, à me tourner vers les journaux. Voyez par vous-même ce qu’annonce l’annonce (oui, je sais) à l’attention de la plèbe au lendemain de mes déboires :
« Mister Boy cherche acolyte non fumeur dans la vingtaine ou jeune trentaine pour partager aventures rocambolesques et peut-être plus. Veuillez soumettre votre candidature par écrit avec lettre de motivation, courte description des pouvoirs ou une narration étoffée du savoir faire.

NB : savoir roter des clous et posséder un permis de conduire valide sont d’indéniables atouts. »

Ce matin, sans grande surprise, je retrouve à la place de mon indémodable boîte à lettres, un monticule d’enveloppes et de colis trop volumineux pour la dite. Par habitude, je trie mon courrier à l’extérieur à l’aide d’une très (très) longue pince à cil munie d’une caméra infra-truc et d’une estampe « retour à l’expéditeur ».

- Pourquoi diantre, Mister?!, me demanderez-vous avec raison, le registre des menaces postales de votre existence s’étendant (en ordre de gravité croissante) du publi-sac à une missive annonçant une visite impromptue de votre belle-maman.

J’utilise la caméra pour scanner le contenu des colis et l’estampe « retour à l’expéditeur » pour marquer ceux qui contiennent du poison et/ou des bombes. La pince à longue tige m’évite d’être décoiffé lors des explosions fortuites et déplorables pouvant se produire à l’estampage.

L’opération triage entraîne son lot de déflagrations et la fonte de la congère de lettres, laissant graduellement réapparaître l’indémodable boîte à lettres mentionnée précédemment. En ouvrant prudemment celle-ci, l’idée me vient de lire en priorité les lettres à l’intérieur puisqu’elles sont arrivées les premières.

J’en dénombre 114 et, fait intéressant, elles proviennent toutes de la même adresse… on a affaire à un caractère compulsif, original. De plus, l’individu s’est débrouillé d’une manière ou d’une autre pour arriver ici avant le facteur. Excès de zèle? Attention particulière? L’un ou l’autre, j’apprécie.

Du tranchant de la main (le côté opposé au pouce), j’ouvre la totalité des enveloppes faisant choir à mes pieds une feuille format légal et une pluie de petits post-it roses.

Le bon sens commande de commencer par la feuille mais je ramasse tout de même l’un des petits carrés de papier rose pour me mettre en appétit. « J’ai traversé le Nil à la nage. Dans le sens de la longueur. En retenant mon souffle.» Pas mal. La feuille, quand à elle, est une présentation pour le moins sommaire. Jugez-en par vous-même :
« Cher Mister Boy,
Je viens justement d’arrêter de fumer et je possède un permis de conduire. Par contre, je ne sais pas roter des clous.
Bien à vous,
Kawra Pa »

Je prends une poignée de post-it et les consulte en vrac. « J’ai inventé le pâté chinois », « Le kung-fu est un art martial mineur », « Je suis une fille », « Mes parents étaient pauvres », « Je joue l’art de la fugue au tuba avec des mitaines à four. En dansant la claquette. »…

Mais encore : « Je connais par cœur l’annuaire téléphonique de Mexico », « Je m’évanouis sur commande », « Août est définitivement le meilleur moment de l’année pour escalader l’Everest », et… chétéra.

Ça frôle l’outrecuidance mais, son nom mis à part, cette Kawra Pa est définitivement le genre de faire-valoir dont j’ai besoin.

Ma décision est prise. Laissant là la (la la la!) pile de post-it, je retourne à mon bureau pour (à la rigueur) entamer une relation épistolaire avec la postulante ou (du moins) lui pondre une réponse.

« Chère Kawra,
quel nom horrible et c’est avec plaisir que j’ai reçu ta candidature.

Es-tu prête à mettre ta vie en péril? Les aventures de Mister, c’est pas d’la p’tite bière, ta mère a de fortes chances de recevoir la fameuse lettre « chère madame, blablabla… avons le regret… Kawra décédée… snif » avec les larmes qui diluent l’encre en bas de page. Je suis pas trop fort sur les épisodes de résurrection alors si tu meurs, faudrait te repartir sous un autre nom.

Ceci étant dit (et ceci amenant cela), voici le contrat d’embauche…

Je soussignée, Kawra Pa, m’engage à servir Mister Boy en toutes situations même les plus incongrues et dégage le dit Mister Boy de toutes responsabilités concernant d’éventuels blessures, grossesses, décès ou autres inconvénients. Je n’entamerai aucune poursuite contre (avec peut-être mais pas contre) le Mister en question. Le Boy s’engage en retour à pas grand chose, si ce n’est qu’un peu de bon temps et le sentiment de réussir sa vie (à condition évidemment de ne pas la perdre au cours de folles aventures).

Apprends à roter des clous, signe ce contrat et je te prends à l’essai.
Bien à toi,
Mister Boy. »

2 commentaires:

Je voudrais commenter cet épisode génial et rayonner par osmose pour une durée de 12 heures: